Les articles L330-3 et suivants du code du commerce règlementent les réseaux commerciaux qui organisent l’exclusivité ou quasi-exclusivité contractuelle autour de l’utilisation d’une marque. Ce texte, dit « Loi Doubin », voté en 1989 et appliqué depuis 1991, a permis d’organiser le secteur de la franchise, auparavant soumis à la seule bonne volonté des franchiseurs. Depuis lors, « toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque, une enseigne, en exigeant d’elle une exclusivité ou une quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères qui lui permette de s’engager en connaissance de cause ».
Cette obligation de sincérité et de transparence a profondément modifié le secteur.
Désormais dématérialisé, le DIP est signé électroniquement afin de mieux contrôler les délais, la qualité et la précision des informations transmises, dont la conformité est déterminante pour la sécurité juridique du franchiseur. L’enjeu de cette démarche est que le candidat consente de manière éclairée au contrat final.
Système le plus élaboré pour un développement en réseau, le contrat de franchise implique la mise à disposition d’un savoir-faire, d’une marque et une assistance permanente. Le tout, en contrepartie d’une rémunération.
Avantages
Le droit de la concurrence admet quelques restrictions de la part de la tête de réseau à l’égard des distributeurs, en présence d’un réel savoir-faire. Il en va ainsi de la clause de non-concurrence ou de la clause d’approvisionnement exclusif.
Les autres systèmes dans un contrat de franchise ne peuvent en principe être associés à des pratiques restrictives de concurrence. Bien utilisé, le contrat de franchise est le système idéal à la fois en droit et en pratique. La distribution moderne exige un savoir-faire à tous les endroits.
Limites
Le contrat de franchise ne peut être utilisé pour des concepts efficaces mais sans expérimentation suffisante. D’autres contrats de distribution permettront de préparer un passage en sécurité vers la franchise.
Le contrat de licence de marque, appelé parfois « contrat de partenariat ou d’affiliation », implique pour la tête de réseau la mise à disposition de sa marque au profit d’un distributeur, le licencié.
Avantages
En plus de parfois plaire aux distributeurs, un partenariat peu formel sert souvent de tremplin à la franchise dans l’attente de profiter d’une expérimentation suffisante.
Limites
En l’absence de réglementation spécifique, la protection du distributeur est limitée. La tête de réseau n’est pas protégée du fait de l’absence d’obligations de respecter l’image de marque avec un savoir-faire. Contrairement à la franchise qui implique une garantie de savoir-faire, ce mode de distribution ne met pas en avant cette qualité, pourtant essentielle. Depuis quelques années, le système se limite le plus souvent à la phase d’apprentissage du concept.
En matière de distribution sélective, les distributeurs sont choisis en fonction de leur aptitude à commercialiser les produits de manière adéquate. Il n’y a pas d’enseigne commune ou de savoir-faire mais des critères objectifs permettant de justifier la sélection des commerçants pour la distribution des produits. Ces critères valorisent substantiellement le produit, tout en limitant l’accès à la distribution des produits.
Sous un régime de concession, le commerçant bénéficie de l’exclusivité de revente des produits de la marque concédée sur une zone géographique déterminée. Comme la franchise, la concession exclusive implique généralement une licence de marque et/ou d’enseigne, mais elle n’est pas obligatoire.
L’exclusivité territoriale et/ou d’approvisionnement est un élément essentiel du système. Il n’y a pas d’obligation de transmission d’un savoir-faire. Et, lorsqu’un savoir-faire est transmis, il ne va pas au-delà des connaissances techniques sur les produits concédés.
Avantages
Le distributeur est rassuré car il dispose d’un territoire réservé.
Limites
Il est difficile de déterminer l’étendue du territoire réservé. Bien souvent, on constate a posteriori que le territoire concédé est trop grand.
La coopérative est un système dans lequel le savoir-faire part des distributeurs vers la tête de réseau tout en redescendant à nouveau. L’ensemble est amélioré par l’expérience de chaque coopérateur. Ce système est très semblable à celui de la franchise :
Avantages
Le savoir-faire est travaillé par tous sans avoir à rémunérer des prestataires chargés de le développer. L’esprit de réseau est renforcé par la double qualité des distributeurs d’exploitants et d’associés de la coopérative.
Limites
La dilution du pouvoir retarde parfois les prises de décision essentielles.
Dans le langage courant, le terme franchise s’applique aux sociétés qui utilisent une marque commune, avec des réalités juridiques souvent bien éloignées des réalités du secteur. Exposé à une marque commune et à l’homogénéité d’un concept, le consommateur ne fait pas de différence entre un magasin franchisé, une succursale ou le membre d’une coopérative. Dans l’esprit du grand public, la franchise est souvent assimilée à une mécanique d’uniformisation des centres-villes et des centres commerciaux, qui n’en est pourtant qu’un aspect. Dans le milieu professionnel, la franchise est également mal connue, car peu enseignée dans les universités et les écoles de commerce : ses fondements, son fonctionnement et sa dynamique restent insuffisamment formalisées.
Depuis 2018, la loi n°2018-670 sur le secret des affaires permet au franchiseur de défendre davantage la confidentialité de l’ensemble des données relatives au savoir-faire de son enseigne. L’article L. 151-1 en particulier vise à protéger « au titre du secret des affaires» toute information répondant aux critères suivants :
Cette loi n’a de valeur que si le franchiseur choisit d’y faire appel. Chaque franchiseur désireux de protéger le savoir-faire de son enseigne doit engager une démarche volontaire qui passe par la formalisation d’une demande. Il est de son devoir de répertorier et de prouver l’appartenance des différents aspects de son savoir-faire, particulièrement les éléments différenciants, pour étayer sa demande. Cette loi est un premier pas vers la protection du concept d’un franchiseur.
La protection du concept est clé pour le franchiseur dans la mesure où elle lui permet de créer un avantage concurrentiel sur le marché. En valorisant les facteurs identifiants, il contribue à freiner la concurrence par l’impossibilité d’utiliser ses signes distinctifs visuels, architecturaux, techniques ou opérationnels. Il s’agit d’une démarche rigoureuse ayant pour objectif une protection optimale de la propriété de l’enseigne.
Les marques ont une durée de vie. Ce n’est pas parce que l’on a déposé initialement une marque, un logo, un nom de domaine ou un mobilier que l’on est sécurisé à vie. Il faut mettre en place une veille permettant de noter l’apparition d’une action sur la marque. Si une tierce personne vient à déposer une marque similaire, l’alerte se génère automatiquement pour indiquer une action potentiellement parasite. Libre au franchiseur ensuite de régler ce problème en empêchant le concurrent de déposer sa marque.
Il convient ainsi, dès l’enregistrement de la marque, de se faire conseiller par un expert en propriété intellectuelle afin de définir la stratégie la plus sécurisante : effectuer une recherche d’antériorité, réfléchir aux classes dans lesquelles on souhaite la déposer, déposer en semi-figuratif (c’est-à-dire incluant la marque commerciale et le logo associé)… Il faut également préciser le libellé des classes exactes (les seuls intitulés de classes d’activité ne suffisent généralement pas) et choisir le périmètre géographique. Un détail utile : s’il s’agit d’une création de marque, il est préférable de réserver en amont l’URL de la marque sur internet avant de la déposer à l’INPI. Tout n’est pas protégeable et là encore, l’expertise d’un juriste s’impose.
Il est nécessaire de savoir détacher ce qui est propre au secteur d’activité de ce qui est propre au concept. Pour une franchise de nettoyage de toitures par exemple, ce qui est propre au secteur réside dans le protocole d’intervention technique, le process de nettoyage d’un chantier, les normes de sécurité, etc. Et ce qui est propre à l’enseigne, dans le centre d’appel avec numéro unique, le logiciel de planning/facturation, la location du véhicule, etc.
Puis, il convient d’isoler ce qui fait la différence de votre savoir-faire : le bâtiment avec les cornes de BUFFALO GRILL, l’agencement avec le carrelage logotisé de FEUILLETTE, le produit avec la sauce secrète de L’ENTRECÔTE, le matériel avec le camion élévateur de ATILLA, l’informatique avec le logiciel de gestion d’O2… Ces éléments, naturellement difficiles à reproduire, offrent une protection simple pour la pérennité du concept.
La digitalisation du savoir-faire permet la création, le regroupement, le traçage, le suivi et l’archivage de toutes les informations relatives au savoir-faire de l’enseigne et son évolution. Le savoir-faire d’une enseigne est naturellement confidentiel et sa transmission doit faire l’objet de certaines précautions.
Dans ce cadre, il est indispensable de choisir un outil sécurisé, qui assure une protection maximale de la propriété du réseau, notamment avec des codes d’accès personnels (obtenus par le franchisé uniquement après signature du contrat), des données protégées, une mention confidentielle, des informations datées et sourcées, un format protégé, etc. L’outil numérique garantit la confidentialité mais aussi la sécurité et la fiabilité du savoir-faire. Le franchiseur doit répondre à certains impératifs afin d’encadrer la transmission et la digitalisation de son savoir-faire. Il doit également prendre en charge la mise à jour des données et la gestion quotidienne de cet outil. Sans cet ensemble de précautions, il lui sera difficile de dénoncer la copie d’informations « non protégées ».
Naturellement, tous les éléments d’un concept ne sont pas protégeables. Afin d’en optimiser la protection, il est impératif d’identifier les points distinctifs et les catégoriser afin de définir des combinaisons protégeables. Plusieurs éléments associés, une fois protégés, sont reconnus comme propres au concept et au savoir-faire de l’enseigne et deviennent donc inexploitables par la concurrence. Après validation juridique, le franchiseur peut rédiger une charte de protection à faire signer aux franchisés.
De son côté, le franchisé doit respecter le concept créé par sa tête de réseau. Le paragraphe 2.3 alinéa a. du Code de Déontologie Européen de la franchise lui impose de «consacrer ses meilleurs efforts au développement du réseau de franchise et au maintien de son identité commune et de sa réputation.» Mais aussi et surtout des enjeux stratégiques. Mise à part les enjeux légaux, la marque et les signes de reconnaissance de l’enseigne relèvent d’un enjeu stratégique exacerbé par un environnement très concurrentiel. Le respect et l’uniformité des recommandations de la tête de réseau ont pour but de :