III. Assister vos premiers franchisés

Étape 9. L’assistance précontractuelle

De la vente à l’assistance

Nous l’avons vu : la signature du contrat de réservation est un point pivot dans la relation franchisé/franchiseur. Elle fait basculer d’une logique de vente sélective dans un environnement règlementé à une véritable assistance pendant toute la construction de son projet.
Cette période de concrétisation est paradoxalement une période à risque pour la sécurité juridique du franchiseur. Tandis que le franchisé sollicite son savoir-faire sur le choix de l’emplacement, la forme juridique de son entreprise et l’obtention du financement, le franchiseur doit à la fois assurer les conditions d’un consentement éclairé et respecter l’indépendance de son franchisé.
Pour cadrer les demandes d’information de son franchisé, le franchiseur a intérêt à les anticiper en posant de manière explicite le cadre de la relation : celui de deux entreprises indépendantes. À la conclusion du contrat de réservation de zone, le franchiseur remet en mains propres les guides de l’emplacement, de la création de société et du financement. Chaque guide rappelle les fondamentaux de la relation franchisé/franchiseur et prodigue l’assistance nécessaire pour réussir chaque étape de la construction du projet, sur la base du manuel opératoire.

Parcours candidats

À l’instar du parcours client, le parcours candidats comporte cinq étapes clés :
À chaque étape sont attachés un ou plusieurs support web, des flux et un taux de conversion. La maîtrise du parcours candidat permet au franchiseur d’accéder à la prévisibilité de son développement.
Guide de la formation
Formation franchise

Points de repères

Guide de l’emplacement

Pour veiller à renforcer la sécurité juridique du franchiseur, il s’avère utile de procéder à un rappel rigoureux de la règlementation qui s’applique à la relation franchisé/franchiseur.
En premier lieu, le guide de l’emplacement rappelle les obligations de chacun :

Ce guide détaille également les caractéristiques idéales de l’emplacement, sous forme de cahier des charges : taille, surface, accessibilité, environnement, etc. Ensuite, il indique les process à appliquer pour trouver le local : qui contacter, quels réseaux, les partenaires du réseau sur ce sujet, les différentes offres et des conseils pratiques de recherche.

La partie suivante concerne l’évaluation du local : grille d’évaluation, conseils méthodologiques pour en évaluer la qualité et liste d’éventuels partenaires de l’enseigne pour la réalisation d’études d’implantation. Enfin, la dernière partie donne des orientations pour négocier au mieux avec les propriétaires et bailleurs, afin que le candidat soit le plus affûté possible dans ses discussions concernant les conditions de prise du local.

Lorsque l’emplacement est stratégique à la réussite du concept, le franchiseur peut annexer au guide une présentation de l’enseigne à destination du bailleur. Cette présentation délivre des informations précieuses sur le réseau, les caractéristiques du concept et l’accompagnement au franchisé. Un tel document peut se révéler déterminant pour l’obtention d’emplacements particulièrement convoités.

Guide du financement

Le guide du financement est à géométrie variable en fonction du concept : son périmètre varie selon les sommes mobilisées. À l’instar du guide de l’emplacement, le guide du financement rappelle des fondamentaux de la sécurité juridique du franchiseur :



  • La construction d’un prévisionnel financier relève de la seule responsabilité du franchisé.


  • Le franchiseur ne peut en aucun cas valider un prévisionnel financier.


  • L’obtention du financement est la seule affaire du franchisé, entrepreneur indépendant et acteur de son projet.

De nombreuses décisions de jurisprudence s’appuient sur les prévisionnels financiers élaborés pendant la phase de construction du projet. Le risque principal est de voir la responsabilité du franchiseur remise en cause en cas de non-réalisation du prévisionnel financier. Au vu de ce risque, il est préférable pour le franchiseur d’opter pour la transparence en remettant à son franchisé l’ensemble des bilans dont il dispose, sur chaque emplacement qui exploite son concept.

En fonction du concept, le guide du financement aborde plusieurs points clés :



  • La création de société. Il s’agit principalement de recommandations sur l’exploitation du concept : code APE, convention collective applicable, dispositifs d’aide à la création, etc. Mais également sur le rôle de l’expert-comptable et les critères de choix de celui-ci.


  • L’aménagement du local. Le budget d’aménagement du local peut être significatif dans certains concepts et il est nécessaire de transmettre au franchisé l’ensemble des informations qui vont lui permettre de calculer son propre budget d’investissement, ainsi que la liste des partenaires référencés, dont certains peuvent être contractuels.


  • La construction du prévisionnel. Si le prévisionnel doit être réalisé exclusivement par le franchisé en collaboration avec son expert-comptable, cet exercice ne peut se faire sans la transmission préalable par le franchiseur de points de repère financiers du concept tels que les ratios commerciaux, d’exploitation et financiers du concept, en précisant la méthodologie de calcul utilisée.


  • L’obtention du financement. Cette partie est consacrée aux relations avec les banques et comporte des conseils de présentation du dossier et de négociation avec les banques mais également une liste de partenaires bancaires du réseau. À noter que le franchiseur ne peut en aucun cas accompagner le franchisé en rendez-vous bancaire ou s’immiscer dans la relation entre la banque et le franchisé.

Dans cette étape cruciale du projet, le franchiseur doit se montrer vigilant à bien respecter l’indépendance du franchisé, qui conçoit un projet à son échelle, élaboré selon sa propre vision de son entreprise. À titre d’exemple, le prévisionnel prend en compte son propre temps de travail, selon qu’il souhaite recruter pour se faire aider ou assumer une part conséquente des heures de travail requises lors de la mise en œuvre du concept. De même, c’est lui qui choisit son niveau d’apport financier et les arbitrages de gestion en fonction de ses propres objectifs patrimoniaux.

Cette étape est l’occasion pour le franchiseur d’adopter la posture qui sera la sienne pendant toute l’exécution du contrat : celle d’un partenaire respectueux de l’indépendance du franchisé et de l’environnement contractuel de la franchise, dont l’assistance bienveillante n’a d’autres but que la réussite commune.

Rétroplanning d’ouverture

Lorsque le contrat définitif est formalisé – c’est-à-dire au déblocage des fonds prévus par le contrat suite à l’accord de la banque pour le financement -, le franchisé rentre dans la phase de rétroplanning d’ouverture. Les trois temps forts sont les travaux d’aménagement du local, la formation et le recrutement. Le franchiseur, toujours dans une logique d’assistance, remet quatre guides à son franchisé en les adaptant à son concept :



  • Le guide de l’ouverture, qui explique au franchisé les échéances principales à venir, ses interlocuteurs au sein de l’enseigne et ce qu’il doit prévoir pour préparer son ouverture.


  • Le guide de l’aménagement, qui détaille les éléments techniques du concept marchand, liste les fournisseurs et les partenaires de l’enseigne, indique les process du réseau et prodigue des conseils issus de l’expérience du réseau.


  • Le guide de la formation, qui prodigue des informations pratiques liées à la formation.


  • Le guide du recrutement, avec les profils cibles à recruter, les sourcing de candidats, les modèles d’annonces, les scripts d’entretien de recrutement, les critères de sélection, d’éventuels tests et les procédures d’intégration du collaborateur.

Rédigés dans un esprit d’assistance au franchisé, ces guides constituent une partie du manuel opératoire du franchisé.

Rendre votre franchisé proactif

Le devoir du franchiseur est d’assister le franchisé dans la réussite de l’exploitation du concept qu’il met à sa disposition, mais aussi dans sa prise d’autonomie. Lorsque ce dernier ne dispose pas d’une expérience préalable de chef d’entreprise ou d’indépendant, il est indispensable de lui transmettre les codes et de lui communiquer l’âme même de son nouveau métier : le sens des responsabilités.


Il arrive fréquemment que le franchisé débutant considère le franchiseur comme son employeur. De la même manière, le franchiseur, dans son souci de bien faire et souvent par ignorance, cherche à aider au mieux le franchisé, franchissant parfois la ligne de son autonomisation : validation du prévisionnel financier, choix du local, sélection des salariés, etc.


Le défi du franchiseur est de parvenir à établir un périmètre clair d’autonomie du franchisé (écrit noir sur blanc dans le process du manuel opératoire du franchisé et dans les différents guides qu’il remet au franchisé) afin que le modèle porte ses fruits. Un franchisé autonome est toujours plus rentable pour l’enseigne : acteur de sa propre réussite, il obtient de meilleurs résultats sur le terrain. Pour le bénéfice de tous.

Passage de main entre développeur et service d’ouverture

Rejoindre une franchise relève d’un acte fort. Le franchisé remet toute sa confiance au développeur de réseau pour lui assurer un avenir professionnel radieux sur les cinq années à venir. Aussi est-il important de prendre ce niveau affectif en considération pour fluidifier l’expérience du franchisé qui a de très fortes attentes vis-à-vis de l’enseigne. Concrètement, son dossier doit être transmis dans les services qui s’occupent du rétroplanning d’ouverture en organisant une réunion dédiée où sont conjointement présents le développeur, la personne qui s’occupe du planning et le candidat à la franchise.


Privilégié, ce moment assure une assistante au franchisé pendant la période de préouverture, que ce soit aux côtés d’un chargé de projet que d’un animateur réseau. Durant cette passation, le développeur indique au franchisé qu’il peut le joindre à tout moment. Prendre soin d’organiser ce passage de main est un excellent moyen d’honorer la confiance que le franchisé porte au développeur de réseau.

Paroles d'experts

Laurent Delafontaine

Être servant sans être servile

Le développeur, le formateur, l’animateur ne sont pas au service d’un franchisé mais d’un réseau composé de franchisés, Ils contribuent à la réussite de toutes les entreprises composant ce réseau et réalisent dans leur rôle respectif, un ensemble d’actions permettant de bien fonctionner et d’assurer la croissance économique de l’enseigne. Nous parlons donc souvent « d’assistance » et non de co-construction, le franchiseur ne doit pas se soustraire au franchisé, mais lui permettre de réaliser par lui-même et devenir ainsi autonome dans l’exploitation du concept. Le rôle de l’enseigne sera par la suite de veiller à la bonne application du concept par le franchisé, de lui apporter conseil en cas de difficultés et de l’accompagner dans la mise en œuvre de ses conseils.

Dans ce chapitre sur l’assistance précontractuelle, la difficulté pour le développeur sera de jauger ce qui est nécessaire, ce qui est utile et ce qui est superfétatoire pour le franchisé. Je vais illustrer mon propos pour mieux comprendre cette fine frontière. Il est dans l’intérêt du développeur de trouver un local commercial à son candidat, en particulier dans le cadre des salariés en reconversion (70% de tous les candidats), qui disposent très rarement d’un emplacement. Le franchiseur doit pouvoir proposer une sélection de locaux, correspondant aux critères de l’enseigne (flux, surface, taux d’effort, …), au risque sinon de voir partir son candidat chez une enseigne concurrente disposant, elle, d’un local dans la ville souhaitée par le candidat.
Pour autant, rien n’empêche le candidat de participer activement à cette recherche. Le franchiseur aura pris soin de lui remettre un « cahier des charges du local », qui lui permettra de rencontrer des agences immobilières, de prospecter localement et de sélectionner les emplacements « éligibles » qu’il présentera au développeur. Le candidat peut aussi découvrir ou approfondir sa connaissance du marché et de la concurrence locale, par le biais d’échanges avec les commerçants sur la vitalité du quartier, les travaux en-cours… mais aussi de visites chez les concurrents pour identifier les forces et faiblesses de chacun, la politique tarifaire…

La recherche du financement est stratégique pour le candidat, faute d’accord bancaire, son projet ne verra pas le jour. Le rôle du développeur est de lui fournir le maximum d’atouts pour augmenter la qualité du dossier, veiller à l’exhaustivité de ce dernier et l’accompagner à distance dans la démarche.
Soit le développeur a l’expérience de la recherche de financement : il aura donc pris soin de référencer différents partenaires financiers, de communiquer un dossier type avec les pièces à fournir et d’informer le candidat des bonnes pratiques. Soit le développeur « délèguera » cette assistance à un courtier financier (tiers partenaire), qui moyennant commission, rédigera et présentera le dossier du candidat aux établissements bancaires. Dans les deux cas, le candidat sera le moteur des démarches et le développeur son carburant, dans le sens de l’alimenter en informations et conseils !

Un point qui m’a souvent été demandé concerne le choix juridique de la société du franchisé. Ces notions juridiques et fiscales ne sont clairement pas du domaine du développeur, même s’il en a les compétences. Cela varie en fonction de sa situation matrimoniale, de son exposition fiscale, et de nombreux autres paramètres que seul un expert-comptable ou un fiscaliste, est habilité à analyser et apporter le conseil adéquat. En voulant bien faire, le développeur qui prendrait part à cette décision, s’exposerait dans le temps à d’éventuelles reproches du candidat.

L’exercice de « faire ou ne pas faire » est donc difficile pour le développeur car le candidat se remet souvent à son expertise, lui demande conseil, l’interroge sur des situations, en somme l’intègre pleinement dans sa démarche, ce qui humainement agréable pour le développeur qui se sent valorisé. Pour autant, il ne doit jamais oublier que le candidat est un entrepreneur indépendant, dont la prise de risque est « sa » responsabilité, et non celle de l’enseigne et de ses représentants.
La nature a horreur du vide
La transparence est l’alliée du franchiseur. D’un côté, la transparence financière permet de renforcer la sécurité juridique du franchiseur en éclairant le candidat à la franchise lors de son choix de contracter avec l’enseigne. De l’autre, la transparence sur les règles de fonctionnement de la franchise permet à la tête de réseau d’assister son franchisé tout en respectant son indépendance.
Parfois, des franchiseurs sont influencés par leur difficulté à lâcher prise lors de l’exploitation de leur concept par un tiers. Mus par le désir de bien faire, ils se substituent au franchisé en validant « oralement » des emplacements ou des prévisionnels. À l’heure du digital, cette tentative de dissimulation de la data est téméraire et de toute façon illégale. Sous la pression d’avocats maîtrisant peu les rouages du recrutement, le résultat peut même être pire : les développeurs de réseau reçoivent la consigne de ne rien valider et passent outre ces instructions dans le secret de leur boite mail. Toutes ces démarches créent un environnement toxique qui nuisent à la performance du modèle et à l’épanouissement du réseau.

Dans un souci de perfection, les franchiseurs peuvent expliquer que certains résultats n’ont pas été concluants : mauvais emplacement, recrutement raté, optimisation de concept qui n’a pas fonctionné… Autant d’essais qui lui permettent de mettre au point un pilote, dont les enseignes bénéficient directement au franchisé. La franchise résultant avant tout de la somme d’un savoir-faire, il serait bien hasardeux qu’un franchiseur prétende n’avoir rencontré que le succès lors de la mise au point de son pilote. Ces tentatives sont aux contraires rassurantes sur la solidité du savoir-faire et le franchiseur doit apprendre à en tirer profit, en partageant son expérience en toute transparence.
Julien Siouffi Expert FFF

Julien Siouffi

Hubert Bensoussan Expert FFF

Hubert Bensoussan

Assistance précontractuelle : les pièges à éviter

1. L’emplacement

Le choix de l’emplacement est fondamental. Il est l’une des causes les plus fréquentes de l’échec d’un franchisé. Il est aussi une source de procès entre franchiseur et franchisé. En effet, en situation d’échec du fait d’une zone peu fréquentée, il n’est pas rare qu’après avoir déposé son bilan, le franchisé s’en prenne au chef de réseau pour tenter de mettre en cause sa responsabilité à ce titre. Voici le type de discours que l’on peut lire dans un cadre contentieux : « le franchiseur connaissait parfaitement les exigences de son concept, il savait que le local n’était pas adapté à l’activité. Pourtant, il a laissé le franchisé s’y installer en pensant à son intérêt exclusif (droits d’entrée et redevances). »
Ce genre de raisonnement n’est pas acceptable pour un franchiseur digne de ce nom comme le sont la plupart des franchiseurs. Malgré tout, le juge peut être sensible à un tel discours si le franchiseur n’a pas pris certaines précautions indispensables :

  • Ne jamais valider expressément l’emplacement ; le choix incombant exclusivement au franchisé.
  • Le franchiseur doit se contenter d’indiquer qu’il ne voit pas d’obstacle à l’installation du franchisé en rappelant à ce dernier que, commerçant indépendant, il doit vérifier lui-même tous les paramètres de commercialité de l’emplacement.
Ces deux précautions suffisent à exclure la responsabilité du chef de réseau.

2. Le financement

Bien souvent les franchiseurs souhaitent avoir la main sur la recherche de financement. En effet, maîtres du concept, ils sont mieux placés que personne pour aider le franchisé à trouver un financement, à convaincre un organisme financier de participer à l’opération de franchise. Cela ne peut se faire sans certaines précautions :

  • Le franchiseur doit se contenter d’indiquer le nom d’organismes financiers.
  • Il ne doit pas s’immiscer dans la négociation avec eux. Il appartient aux seuls franchisés, indépendants, d’opérer cette négociation. On a vu pour le budget prévisionnel qu’il est totalement inopportun pour un franchiseur de s’immiscer dans sa rédaction. Si celui-ci participe à la négociation avec l’organisme financier, il aura nécessairement accès au budget prévisionnel du franchisé et devra sans doute même le défendre en face du banquier. Cette situation peut conduire le franchisé en échec à tirer profit de l’intervention du franchiseur auprès du banquier pour prétendre qu’il a été trompé sur le budget prévisionnel et solliciter des dommages et intérêts.